Matières : Contrat de travail
Mots clés : Contrat du travail - détention préventive du travailleur - Suspension du contrat de travail –libération provisoire du travailleur - réintégration (non) – licenciement (non) – défaut de preuve
Conformément aux dispositions de l’article 13 du code de travail, ne peut être considéré comme un licenciement le fait par l’employeur de s’abstenir de réintégrer au moment de la libération provisoire, un travailleur dont le contrat de travail a été suspendu pour cause de détention préventive. Encourt la cassation la décision de la cour d’appel qui retient l’existence d’un licenciement en cours de suspension du contrat de travail alors que le licenciement dont il est fait état n’a pas été prouvé et qu’aucune décision écrite, devant être notifié, comme l’exigent les articles 21 et 22 du code de travail, n’a pas été produite.
Cassation : Ordinaire
Nature : Sociale
Solution : Cassation
ARRET N°100 du 10 mai 2011
Dossier n°336/10-SOC
CONTRAT DU TRAVAIL – DÉTENTION PRÉVENTIVE DU TRAVAILLEUR SUSPENSION DU CONTRAT DE TRAVAIL – LIBÉRATION PROVISOIRE DU TRAVAILLEUR – RÉINTÉGRATION (NON) – LICENCIEMENT (NON) – DÉFAUT DE PREUVE
« Conformément aux dispositions de l’article 13 du code de travail, ne peut être considéré comme un licenciement le fait par l’employeur de s’abstenir de réintégrer au moment de la libération provisoire, un travailleur dont le contrat de travail a été suspendu pour cause de détention préventive.
Encourt la cassation la décision de la cour d’appel qui retient l’existence d’un licenciement en cours de suspension du contrat de travail alors que le licenciement dont il est fait état n’a pas été prouvé et qu’aucune décision écrite, devant être notifié, comme l’exigent les articles 21 et 22 du code de travail, n’a pas été produite. »
Banque XXX
C/
T.A.T.
REPUBLIQUE DE MADAGASCAR
AU NOM DU PEUPLE MALAGASY
La Cour de Cassation, Chambre Civile, Commerciale et Sociale, en son audience ordinaire tenue au Palais de Justice à Anosy le dix mai deux mille onze, a rendu l’arrêt suivant :
LA COUR,
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur le pourvoi de la Banque XXX, ayant son siège social à Antaninarenina, Antananarivo, représenté par son gouverneur, Frédéric RASAMOELY, contre l’arrêt CATO- 04/SOC/10 rendu le 11 mars 2010 par la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Toamasina, dans le litige qui l’oppose à T.A.T. ;
Vu les mémoires en demande et en défense produits :
Sur le premier moyen de cassation tiré de l’application de l’article 26 de la loi organique n° 2004-036 du 1er octobre 2004 relative aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois cours la composant, pris de la violation des articles 13, 21 et 22 du code de travail, fausse application de la loi ;
en ce que, la Cour d’Appel a considéré comme abusif le licenciement intervenu consécutivement à une mise à pied infligée au travailleur et pendant la durée légale de la suspension ;
alors que, d’une part la rupture du contrat de travail n’est pas le fait de la Banque XXX, car elle n’a jamais procédé au licenciement de T.A.T. mais a seulement décidé de sa mise à pied ; et d’autre part, l’affaire pénale contre le défendeur en cassation pour abus de confiance étant toujours pendante devant la juridiction répressive, il aurait dû être fait application du principe « le criminel tient le civil en l’état » :
Attendu sur la deuxième branche du premier moyen, que le principe selon lequel le criminel tient le civil en l’état est agité pour la première fois devant la Cour de Cassation ; que ce moyen est donc Irrecevable :
Mais sur la première branche du moyen ;
Vu les textes de loi visés ;
Attendu qu’li convient de rappeler, que suite à la disparition de billets de banque à l’Agence de la Banque XXX de Toamasina et sur plainte de cette dernière, T.A.T. a été placé sous mandat de dépôt le 15 mai 2007 et libéré le 15 décembre 2007, bénéficiant d’une décision de mise en liberté provisoire ; que son contrat de travail a été suspendu par décision n° 206/2007 dès sa mise en détention ; que la Banque XXX n’a pas encore réintégré à son travail T.A.T. malgré ses demandes du 18 décembre 2007 et 29 octobre 2008 ;
Que de ces faits, la Cour d’Appel a considéré qu’il y a licenciement déguisé et que la Banque Centrale ne peut se réfugier derrière le simple fait qu’elle n’a pas formalisé le licenciement par une lettre ou une décision officielle ;
Attendu que l’article 13 du code du travail stipule qu’aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail lorsqu’il se trouve suspendu ; que le contrat est suspendu pendant la durée de la détention préventive du travailleur ayant bénéficié d’une décision judiciaire de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement pur et simple ou au bénéfice du doute et la réintégration du travailleur est, dans ce cas, obligatoire ;
Attendu en l’espèce que T.A.T. ne bénéficie pas d’une décision judiciaire de non lieu, de relaxe ou d’acquittement pur et simple ou au bénéfice du doute, car l’instance pénale dans laquelle il est poursuivi n’est pas encore définitivement solutionnée ; que sa réintégration n’est pas obligatoire et le fait pour la Banque XXX de s’abstenir de le faire au moment de sa libération provisoire ne peut être considéré comme un licenciement ; que la Cour d’Appel a fait ainsi faussement interprété la loi, et l’arrêt encourt la cassation ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de l’application de l’article 26 de la loi organique n° 2004- 036 du 1 octobre 2004 relative aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois cours la composant, et de la violation des articles 21 et 22 du code de travail, contradiction de motifs, fausse application et violation de la loi ;
en ce que, la Cour d’Appel a retenu aux motifs de sa décision, que par une décision n° 206 du 1er juin 2007, T.A.T. fut mis à pied puis licencié par décision n° 194 en date du 15 mai 2007 ; que la rupture du contrat fut décidée pendant la période légale de suspension ;
alors que, la rupture du contrat de travail n’est nullement imputable à la Banque XXX qui n’a jamais procédé au licenciement du travailleur, mais a seulement décidé de sa mise à pied ; qu’aucune pièce du dossier ne vient confirmer un quelconque licenciement ; que le Tribunal de première instance avait quant à lui motivé sa décision sur l’existence d’une double sanction pour une même faute, et il y a contradiction de motifs dans les décisions des deux juridictions :
Vu les textes de loi visés ;
Attendu certes, que l’appel tend à faire réformer ou annuler par la Cour d’Appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré que ce faisant la juridiction d’appel qui procède à un nouvel examen de l’affaire en fait et en droit, et a des motifs bien distincts de ceux du juge d’instance ; que l’on ne saurait dès lors soutenir l’existence d’une contradiction de motifs entre leurs décisions ;
Mais attendu cependant, que contrairement aux assertions de l’arrêt attaqué, pendant la période légale de suspension du contrat de travail, la décision n°206 du 1 juin 2007 (c.10) n’est intervenue que pour suspendre le contrat de travail de T.A.T., tandis que la décision n°194 du 15 mai 2007 (c.11) qui lui est antérieure, concerne un retard d’avancement et une mise à pied de 15 jours avec perte de salaire correspondant ; que le licenciement dont il est fait état n’est pas prouvé et aucune décision écrite, devant être notifiée, comme l’exigent les articles 21 et 22 du code de travail n’est produite ; que la Cour d’Appel a manifestement violé les dispositions légales et sa décision encourt dès lors la cassation.
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l’arrêt CATO-04/SOC/10 rendu le 11 mars 2010 par la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Toamasina ;
Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ;
Ordonne la restitution de l’amende de cassation.
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Chambre Civile, Commerciale et Sociale en son audience publique les jours, mois et an que dessus.
Où étaient présents :
Mesdames et Messieurs :
La minute du présent arrêt a été signée par le Président, le Rapporteur et le Greffier.