Matières : Droit du travail
Mots clés : Contrat de travail - suspension
Aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail lorsqu’il se trouve suspendu.
Cassation : Ordinaire
Nature : Sociale
Solution : Rejet
ARRET N° 51 du 23 mars 2010
Dossier n° 445/06-SOC
CONTRAT DE TRAVAIL – SUSPENSION
« Aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail lorsqu’il se trouve suspendu. »
La banque XXX
C/
J.L.D.H.
REPUBLIQUE DE MADAGASCAR
AU NOM DU PEUPLE MALAGASY
La Cour de Cassation, Chambre Civile, Commerciale et Sociale, en son audience ordinaire tenue au Palais de Justice à Anosy le vingt-trois mars deux mille dix, a rendu l'arrêt suivant :
LA COUR,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant sur le pourvoi de la banque, Société Anonyme dont le siège social se trouve au 2, place de l'indépendance, Antananarivo, élisant domicile en l'étude de ses Conseils Maitres Hanta et Koto RADILOFE Avocats à la Cour, contre l'arrêt n° 307 rendu le 18 mai 2006 par la Chambre Sociale de la Cour d'Appel d'Antananarivo dans la procédure l'opposant à J.L.D.H. ;
Vu les mémoires en demande et en défense produits :
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 180 et 409 du code de procédure civile, non réponse à conclusions déposées, défaut de motifs ;
En ce que, la Cour d'Appel a jugé qu'en application du principe du maintien des contrats en cours, la banque XXX ne saurait être mise hors de cause ;
Alors que, la même Cour a relevé que J.L.D.H. était un employé de la société YYY pendant 17 ans, et n'a jamais fait partie du personnel de banque XXX ; que ses années de service sont arrêtées au 17 octobre 1988 sur la base du certificat de travail et de la lettre de suspension de la société YYY, or la cession intervenue entre la banque XXX et la société YYY est postérieure à cette date.
Attendu que pour appliquer le principe du maintien du contrat en cours, l'arrêt déféré a retenu :
« ....qu'il est constant et incontesté... que le sieur J.L.H.D. était un employé de la société YYY, et ce durant 17 années;
Qu'il est également constant que la banque XXX a repris la société YYY ;
Qu'il est de principe que le transfert d'entreprise est caractérisé par l'application du principe du maintien des contrats en cours ;
En application du principe du maintien des contrats en cours, la banque XXX ne saurait être mis hors de cause... »
Attendu que l'arrêt attaqué s'est fondé sur les dispositions de l'article 24 du Code du Travail, qui stipule que si une modification survient dans la situation juridique de l'employeur, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification, subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise, et que leur résiliation ne peut intervenir que dans la forme et les conditions légalement prévues ;
Attendu qu'aux termes de l'article 25 du Code de Travail, aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail lorsqu'il se trouve suspendu ; que l'alinéa 11 dudit article précise même que le contrat est suspendu pendant la durée de la détention préventive du travailleur ayant bénéficié d'un non-lieu ou d'un acquittement définitif, que tel est bien le cas d'espèce :
Attendu certes que la cession entre la banque XXX et la société YYY n'est intervenue que postérieurement à la date de suspension du contrat de travail, et qu'à ce moment-là, J.L.D.H. était au service ni de l'une ni de l'autre; que cependant le contrat de travail de J.L.D.H était seulement suspendu et il appartenait à qui de droit de se conformer aux dispositions régissant la matière pour mettre fin à cette relation de travail encore en cours», ce qui n'a pas été fait; que J.L.D.H n'a jamais reçu de réponse à sa lettre du 11 juillet 2000 sollicitant sa réintégration ;
Qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué a dès lors fait une juste application de la loi ; que le premier moyen se trouve inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 180, 409 et 412 du code de procédure civile, de l'article 315 de la loi sur la théorie générale des obligations, non réponse à conclusions déposées, insuffisance et contradiction de motifs équivalent à un défaut de motifs ;
En ce que, en application de ce principe du maintien des contrats en cours, la Cour d'Appel a jugé que la banque XXX ne saurait être mise hors de cause, contrairement à la Société ZZZ, laquelle n'a jamais été mise en cause dans la procédure ;
Alors que, d'une part JEAN LOUIS Delphin Honoré a demandé que toute décision rendue à l'encontre de la société YYY soit opposable à la société ZZZ, en se référant à une lettre de cette dernière SGR/Lu/S/04 du 21 juin 2004, qui admettait indemniser à l'amiable ou après décision de condamnation les agents dont le contrat de travail est suspendu; qu'il a été relevé que dans sa lettre du 4 octobre 2005, la banque XXX déclarait que les litiges nés au cours de la vie sociale de la société YYY resteront du ressort de la seule société YYY dont la société ZZZ est le prolongement:
Alors que d'autre part, la société YYY ex-société ZZZ a été dûment convoquée et a présenté ses moyens devant la Cour d'Appel comme il est expressément relevé dans l'arrêt ; que la Cour d'Appel n'a donc pas discuté la portée de l'aveu judiciaire faite par la société YYY ex-société ZZZ auquel les parties se sont référées même implicitement dans leurs moyens d'appel ;
Alors que, encore d'autre part, la Cour d'Appel a méconnu les dispositions de l'article 412 du code de procédure civile permettant à toute partie justifiant d'un intérêt d'intervenir par simples conclusions en cause d'appel, ou d'y être appelée par une partie si l'évolution du litige implique leur mise en cause ;
Attendu sur la mise en cause de la société YYY ex-société ZZZ, que l'arrêt attaqué a retenu dans ses motifs ;
« ....Attendu que la société YYY ex-société ZZZ, convoquée au procès, souligne qu'elle n'a pas été partie en première instance et n'a pas été mise en cause devant le tribunal ;
Que cependant, en application du principe du maintien des contrats en cours, la banque YYY ne saurait être mise hors de cause, contrairement à la société YYY, qui n'a jamais été mise en cause dans la présente procédure »:
Attendu qu'il est reproché à la Cour d'Appel d'avoir écarté de la procédure la société YYY ex-société ZZZ qui aurait formulé un aveu judiciaire engageant sa responsabilité, et dont la Cour aurait dû tirer toutes les conséquences de droit qui s'imposaient ;
Mais attendu que la Cour d'Appel, en l'état de ces énonciations, a bel et bien envisagé la possibilité d'engager la responsabilité de la société YYY ex-société ZZZ, puisqu'elle l'a convoquée qu'en décidant de l'écarter elle a nécessairement examiné les parts de responsabilité des parties en présence, et l'application du principe du maintien des contrats en cours justifie amplement sa décision que dès lors le moyen en cette branche ne saurait prospérer ;
Que, sur l'autre branche du moyen reproche à la Cour d'Appel d'avoir passé sous silence « l’aveu judiciaire » fait par la société YYY ex-société ZZZ, il y a lieu de relever que l'écrit du 21 juin 2004 est ainsi énoncé : Il en découle que, suite aux actions judiciaires introduites à son encontre, la société YYY ex-société ZZZ est souvent contrainte d'indemniser, soit à l'amiable soit après une décision définitive de condamnation, ces plaignants dont le nombre tend à croitre..." ;
Attendu que l'article 314 de la loi sur la théorie générale des obligations définit l'aveu comme la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai et comme devant être avéré à son égard un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques et selon l'article 315 de la même loi, l'aveu judiciaire fait plein foi contre son auteur :
Attendu en l'espèce que ces dispositions ne peuvent trouver application dans la mesure où le moyen n'a cité qu'une partie du contenu de ladite lettre, qui lui semblait favorable, en omettant délibérément la suite de la phrase conçue en ces termes: « Il convient cependant de rappeler, Monsieur le Directeur Général, que la mission de la société YYY ex-société ZZZ ne consiste pas à gérer de tels litiges, mais à recouvrer pour le compte de l'Etat Malagasy les créances compromises de l'société YYY ex-société ZZZ, ainsi qu'à gérer le patrimoine mobilier et immobilier de cette dernière ».
Attendu ainsi que les propos dont le moyen veut tirer avantage, replacés dans leur contexte ne donnent guère le sens qu'il veut y attribuer qu'il s'avère aussi inopérant ;
Attendu enfin que l'analyse des documents versés au dossier relève de considérations de fait dont la connaissance échappe à la Cour de Cassation ;
Que le pourvoi à ce titre, doit être rejeté ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le demandeur à l'amende ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Chambre Civile, Commerciale et Sociale en son audience publique les jour, mois et an que dessus.
Où étaient présents ;
Mesdames et Messieurs ;