Matières : Licenciement
Mots clés : Licenciement abusif- double sanction
Le licenciement effectué en violation de la règle d'interdiction de la double sanction est irrégulier et le rend abusif
Cassation : Ordinaire
Nature : Sociale
Solution : Cassation
Arrêt n°245 du 6 novembre 2009
Dossier n°522/06-SOC
LICENCIEMENT ABUSIF- DOUBLE SANCTION
« Le licenciement effectué en violation de la règle d'interdiction de la double sanction est irrégulier et le rend abusif. »
R.A.
C/
Société XXX
REPUBLIQUE DE MADAGASCAR
AU NOM DU PEUPLE MALAGASY
La Cour Suprême, Cour de Cassation, Chambre Civile Commerciale et Sociale, en son audience ordinaire tenue au Palais de Justice à Anosy du vendredi six novembre deux mille neuf, a rendu l’arrêt suivant ;
LA COUR
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
Vu les mémoires en demande et en défense;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 25 du Code de Travail, en ce que le licenciement est intervenu en cours de suspension du contrat peur peut de travail, alors qu'il est stipulé dans cette article que : « Aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail lorsqu'il se trouve suspendu »
Attendu que la mise à pied entraîne la suspension du contrat de travail mais elle ne rentre pas dans les 11 cas prévus par l'article 25 du Code de Travail dans lesquels il ne peut y avoir de licenciement ; le moyen est donc inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 33 du Code de Travail en ce que l'employeur a bien invoqué un nouveau motif de licenciement alors que l'exposant a été convoqué devant le conseil de discipline pour d'autres motifs et que ce motif, à savoir, le faux en matière de certificat médical qui a été retenu par l’arrêt attaqué à l’appui de sa décision est nul de plein droit ;
Attendu que R.A. a été licencié pour plusieurs motifs et notamment au vu d'un faux certificat médical:
Attendu que le faux certificat médical a fait l'objet d'un débat lors du conseil de discipline, ce qui signifie que R.A. a pu se défendre sur l'existence du faux certificat médical ; que par conséquent, le motif de licenciement basé entre autres sur le faux certificat médical ne constitue guère un nouveau motif de licenciement ;
Qu'il apparaît que le moyen est à écarter ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 159 du code pénal en ce que la Cour d'Appel a été induit en erreur sur l'existence de faux et de la reconnaissance par l'exposant du faux alors que l'article 159 définit le faux comme la fabrication sous le nom d'un médecin chirurgien ou autre officier de santé d'un certificat de maladie ou d’infirmité ;
Attendu que le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'outrepasser sa compétence d'appréciation du faux qui relève de la compétence d'un juge pénal ;
Attendu que les juges du fond apprécient souverainement les pièces présentées comme preuves, à défaut d'une procédure d'inscription de faux ;
Attendu que le moyen tente de remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond de considérations de faits échappant au contrôle de la Cour de Cassation et ne saurait être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation de l'article 4 du Code de Procédure Pénale en ce que la Cour d'Appel a retenu à l'appui de sa décision, un faux présumé perpétré en 1996 alors que l'arrêt a été rendu le 20 mars 2003 et que la Cour a basé sa décision sur un fait prescrit ;
Attendu que le moyen soulevé pour la première fois est irrecevable ; qu'en outre, la prescription ne joue pas dans le cas de l'espèce, faute de poursuite pénale ;
Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation de l'article 26 de la loi organique n°2004.036 du 1er octobre 2004 sur la Cour Suprême, absence, insuffisance, contradiction des motifs et généralement l'impossibilité pour la Cour d'exercer son contrôle, en ce que, la Cour d'Appel a motivé sa décision sur une infraction pénale non encore appréciée par la juridiction pénale et des faits pénalement prescrits alors que la Cour de Cassation statuant en matière sociale est dans l'impossibilité d'exercer son contrôle car ces faits de nature pénale échappent à sa compétence;
Attendu que pour confirmer le jugement entrepris, la Cour d'Appel énonce : « Attendu que la première faute était déjà sanctionnée, elle ne saurait servir de base pour la condition de cas de récidive débouchant sur l'application d'une double sanction à l'égard du même fait ;
Attendu que si le licenciement était exclusivement fondé sur lesdits motifs, il ne peut qu'être abusif ; Attendu cependant que l'usage de certificat falsifié ne peut être contesté, que le contenu dudit certificat fait état d'une consultation et d'un examen de l'intéressé par le docteur M.B. ; que cette affirmation mensongère aurait dû pousser R.A. à ne pas en faire un usage quelconque, puisque lui-même, il reconnaît ne pas avoir fait l'objet d'un examen médical, effectué par ce médecin ;
Attendu que l'usage d'écrit visiblement faux altère la confiance que peut avoir l'employeur envers son employé ;
Attendu que de tout ce qui précède, c'est à bon droit que le premier juge a statué comme il l'a fait, qu'il échet de confirmer le jugement entrepris »;
Attendu qu'il est constant et non contesté que la XXX a infligé une mise à pied jusqu'à la décision du conseil de discipline, contre son employé R.A., au seul vu du certificat médical dont elle conteste la véracité, sans procéder à l'avis préalable prévu par le code du travail ;
Attendu que la mise à pied est une sanction,
Qu'en écartant la règle de double sanction sur les absences injustifiées, alors qu'elle vient d'adopter ladite règle en ce qui concerne la faute basée sur le faux certificat médical, la Cour ne peut que se contredire,
Qu'en décidant comme elle l'a fait, la Cour n'a pas non seulement insuffisamment motivé sa décision, mais également s'est contredite dans ses motifs ;
Que dès lors, le licenciement effectué en violation de la règle d'interdiction à la double sanction est irrégulier et le rend abusif ;
Vu les textes visés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE l'arrêt n°23 du 20 mars 2003 rendu par la Chambre Sociale de la Cour d'Appel d’Antananarivo ;
Renvoie la cause et les parties devant la même Juridiction autrement composée ;
Ordonne la restitution de l'amende de cassation ; Condamne la XXX à l'amende et aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé par la Cour Suprême, Cour de Cassation, Chambre Civile Commerciale et Sociale, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.
Où étaient présents :
La minute du présent arrêt a été signée par le Président, le Rapporteur et le Greffier.